C’est ce principe qui a été affirmé par la chambre sociale de la Cour de Cassation dans des arrêts récents –du 4 avril- dans plusieurs dossiers qui intéressaient des postiers.
Depuis le début des années 1990 deux statuts cohabitent à la poste : les fonctionnaires et des salariés de droit privé.
Pour parvenir à l’équité entre ces deux statuts, la poste a regroupé les primes antérieurement attribuées aux fonctionnaires en une prime dite de « complément poste » ensuite étendue aux salariés de droit privé.
Certains postiers ont engagé des actions s’estimant victimes d’une différence de traitement injustifiée par rapport à leurs collègues fonctionnaires percevant un complément poste supérieur au leur.
Les premières interrogations des juges sont les suivantes :
- Les fonctionnaires auxquels se comparent les agents de droit privé occupent-ils des fonctions identiques ou similaires aux leurs ?
- Ces fonctions sont-elles de même niveau ?
Si les fonctions sont comparables et de même niveau c’est à l’employeur de démontrer que l’écart est justifié par une meilleure maîtrise de son poste par le fonctionnaire.
A cet égard la jurisprudence nous apprend que cette maîtrise peut résulter de la diversité et de la nature des postes précédemment occupés par le fonctionnaire.
Extraits de la décision de la chambre sociale de la Cour de Cassation du 4 avril 2018 (17-11.680 à 17-11.693)
Attendu que les salariés font grief aux arrêts de rejeter leur demande au titre du complément Poste, alors, selon le moyen :
- / qu’il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe d’égalité de rémunération, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, à charge pour son employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs justifiant cette différence ; que le salarié, agent contractuel (ACO), avait produit, au soutien de sa demande, un tableau reprenant les sommes perçues mois par mois à titre de complément poste, un tableau reprenant le complément poste versé chaque mois, sur la même période, à un agent fonctionnaire (AFO) de grade équivalent, un tableau reprenant le différentiel entre les sommes qu’il avait perçues et celles des fonctionnaires placés dans une situation identique et enfin les bulletins de paie desdits fonctionnaires ; qu’il avait ainsi satisfait à la charge de l’allégation qui pesait sur lui ; qu’en le déboutant néanmoins de sa demande sans exiger de La Poste qu’elle justifie la différence de traitement ainsi mise en exergue, la cour d’appel a d’ores et déjà violé le principe « à travail égal, salaire égal » ;
- / qu’en affirmant, pour écarter sa demande, que le salarié n’aurait pas indiqué à quel fonctionnaire il se serait comparé, quand il avait communiqué les bulletins de paie de Mme Y… et de MM. Z…, A…, B…, C…, D… et E… qui exerçaient les mêmes fonctions de facteur, mais en qualité d’agent fonctionnaire, la cour d’appel a encore violé le principe « à travail égal, salaire égal » ;
- / qu’il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe d’égalité de rémunération, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, à charge pour son employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs justifiant cette différence ; qu’en retenant, pour débouter le salarié de sa demande, que la comparaison qu’il effectuait ne permettait pas de vérifier s’il n’existait pas concrètement des raisons objectives de justifier la différence de montant de complément poste, quand la preuve d’une justification objective à cette différence incombait à l’employeur, la cour d’appel a violé l’article 1315 du code civil ;
- / qu’en déboutant le salarié de sa demande au motif que La Poste aurait justifié de ce que la comparaison qu’elle opérait n’aurait pas fait apparaître de différences, sans répondre au moyen des écritures de la salariée tiré de ce que l’employeur avait choisi comme élément de comparaison des fonctionnaires du secteur médian et avait sciemment occulté dans son comparatif tous les fonctionnaires du secteur haut, de sorte que la comparaison se trouvait faussée, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu’ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que les fonctionnaires percevant un complément Poste “seuil haut” auxquels les salariés se comparaient, quoiqu’exerçant en dernier lieu au même niveau des fonctions identiques ou similaires de facteur, avaient tous, à la différence des salariés, occupé des fonctions qui, par leur diversité et leur nature, leur conféraient une meilleure maîtrise de leur poste, la cour d’appel en a exactement déduit, sans inverser la charge de la preuve, qu’aucune atteinte au principe d’égalité de traitement n’était établie ; que le moyen n’est pas fondé ;