Il n’est malheureusement pas rare que, dans certaines entreprises, des salariés soient mis au placard du fait de leur âge.
Les juges ont alors toute latitude pour sanctionner les sociétés qui adoptent ce type de pratiques ;
C’est précisément ce qui s’est passé au sein d’une entreprise qui avait licencié l’un de ses directeurs pour insuffisance professionnelle après que ce dernier ait refusé de partir dans le cadre d’une rupture conventionnelle.
Le salarié a immédiatement saisi les juridictions et a sollicité l’annulation de son licenciement en raison d’une discrimination en raison de l’âge.
Plusieurs arguments ont été avancés à l’appui de sa demande qui laissaient supposer l’existence d’une discrimination :
- La société a un système de promotion pyramidale qui exclut les salariés qui ne sont pas en mesure d’accéder à l’échelon supérieur. Ce système était dénommé « up or out » ;
- Il est notoire que la société évince les salariés de plus de 45 ans arrivés à un niveau élevé. En témoigne la très faible proportion de salariés de 40 ans et plus dans l’entreprise (6 %) en comparaison de celle du secteur d’activité (52 %) ;
- Les propos du président du groupe, communiqué de presse et article de journal à l’appui, qui aurait reconnu publiquement sa volonté de se séparer de 7 % de ses cadres dirigeants âgés ;
- Le registre du personnel montre que sur une période de 90 jours autour de son licenciement, 9 directeurs exécutifs âgés de plus de 40 ans ont quitté la société via des ruptures négociées.
- La Cour de Cassation a considéré que ces éléments « pris dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’une discrimination en raison de l’âge » sachant que l’insuffisance professionnelle n’avait pas été retenue par les juges du fond comme étant une cause réelle et sérieuse.
- L’affaire va être renvoyée devant une Cour d’Appel ; charge désormais à la société de démontrer que la décision de licencier ce directeur était étrangère à son âge…
Extraits de la décision de la cour de cassation sociale du 12.04.2018 (n°16-25503) :
« Attendu que pour rejeter les demandes du salarié relatives à la discrimination en raison de l’âge et à la nullité du licenciement, l’arrêt retient que tant la corrélation entre les effets d’un système de promotions dans une structure à la fois hiérarchisée et pyramidale tendant à l’exclusion des salariés n’étant pas en mesure d’accéder à l’échelon supérieur, dit de « up or out », au surplus manifestement accepté, la réduction alléguée de
la proportion de cadres de plus de quarante ans au niveau supérieur, a fortiori sur des chiffres au demeurant discutés, que la proposition d’un départ négocié ne constituent des éléments de fait laissant en soi supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte fondée sur l’âge du salarié ;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement pour insuffisance professionnelle notifié après proposition d’une rupture conventionnelle, ainsi que l’existence d’un système dit de « up or out » tendant à l’exclusion des salariés n’étant pas en mesure d’accéder à l’échelon supérieur, et sans examiner les autres éléments avancés par le salarié, notamment ceux relatifs au départ peu après son licenciement de neuf directeurs exécutifs âgés de plus de quarante ans, et à la faible proportion de salariés âgés de plus de quarante ans présents dans l’entreprise au regard de la proportion de ces mêmes salariés dans la branche professionnelle, tous éléments qui, pris dans leur ensemble, laissaient supposer l’existence d’une discrimination en raison de l’âge, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il condamne la société Accenture à payer à M. Y… la somme de 260 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant du respect de la clause de non-concurrence nulle, l’arrêt rendu entre les parties par la cour d’appel de Paris, le 1er septembre 2016 ; remet en conséquence sur les autres points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée »